Plus de croissance, plus de population entraînent automatiquement une diminution des ressources ? Pas si sûr avançait il y a quelques années Jesse Ausubel, scientifique à la Rockfeller University qui démontrait à l’époque que nous utilisions (beaucoup) moins de ressources pour produire les même biens. Cette thèse des bénéfices de la dématérialisation est également défendue par Andrew Mc Afee du MIT qui considère dans son dernier livre “More from less” que les technologies digitales, en permettant un usage drastiquement réduit des ressources naturelles pourraient d’une façon contre intuitive venir au secours de l’environnement. Selon lui grâce aux nouvelles technologies on peut à la fois faire croître les économies et accroître la prospérité tout en prenant soin de la planète. Même s’il admet que le digital ne résoudra pas à lui tout seul l’immense défi de l’accélération climatique il envisage des solutions possibles à la prédation des ressources planétaires.
Peak Stuff
Il y a quelques années Tom Price dans un article sur la macrotendance du Peak Stuff arrivait aux mêmes conclusions expliquant que l’usage déclinant des ressources trouvait sa source dans la généralisation dans les pays occidentaux du phénomène des 3D “Désencombrement, Densification (Urbaine) et Découplement (entre croissance et extraction des ressources). Il relevait que 89 des matériaux parmi les 100 les plus utilisés au monde étaient en décroissance absolue.
L’économie du “Less”
Moins de Nickel, moins de fer, moins de de fertilisants, moins de bois, moins d’eau. Andrew McAfee pointe que l’usage de nouvelles technologies et de nouveaux matériaux ont permis de réduire l’usage de bois aux US de 20 à 30% depuis le début des années 1990 et de 40% pour le papier. Il note que malgré l’explosion d’Amazon l’usage de carton est le même qu’en 1995, que les canettes de boisson en Aluminium sont 5 fois moins lourdes qu’il y a 20 ans… Attention on est encore loin du “Peak Stuff” généralisé, particulièrement dans le plastique estime Andrew McAfee mais nous sommes à un point d’inflexion dans l’utilisation des ressources naturelles grâce à la technologie, l’optimisation constante de la supply chain et l’agriculture de précision. Dans la course contre le temps climatique la question demeure : cette tendance à la dématérialisation des ressources sera t-elle suffisante ? La décarbonisation de l’économie n’est pas assez rapide admet Andrew McAfee qui recommande un système de plafonnement et d’échange pour les gaz à effet de serre ou une taxe Carbone massive comme le recommande le prix Nobel Bill Nordhaus. Une question de courage politique explique t-il…
Dématérialiser la croissance
La dernière lueur d’espoir ce sont les entreprises qui ne voudront plus figurer comme des dinosaures, voraces insatiables d’énergie carbone faute de voir leurs talents d’aujourd’hui et les talents de demain les fuir comme la peste. A ce stade, même s’il reste optimiste, rien ne dit que cette tendance peut durer. La dématérialisation de notre croissance et de notre consommation peut et doit s’accélérer. Le but ultime selon Andrew McAfee : “rendre la nature sans valeur”. Attention, pas de proposition choquante ni de slogan facile derrière cela. Son ambition : faire que l’avancée des bio-matériaux et de la technologie rende sans valeur le simple acte de couper un arbre. Optimiste Adrew McAfee ? On peut rapidement l’assimiler à un Bisounours de la croissance ou à un Ravi de la crèche du solutionnisme…Il ne croit pas que la technologie soit de “la poudre de fée” mais pour lui, “ce n’est pas la décroissance qui nous sauvera c’est la dématérialisation.” Il ajoute : “ La dématérialisation est la meilleure nouvelle environnementale du monde.” Ira t-elle assez vite ?