40 ans, c’est le temps que mettent les rejets de CO2 à impacter l’atmosphère et le réchauffement climatique…Nous vivons donc les effets des rejets industriels de la fin des années 1970 alors que l’impact de nos rejets actuel ne sera visible qu’en 2059.
Cette “violence lente” comme la nomme Rob Nixon dans son livre “Slow Violence and the Environmentalism of the Poor” fait que le changement climatique est difficile à représenter, à concevoir et à imaginer. Il est partout et nulle part, sans contour défini et les images qui circulent généralement : une tornade, un tsunami, une comète sont celles des symptômes (un ours blanc mourant, un feu de forêt) et non celles de l’objet lui-même.
Cette violence lente du changement climatique a juste là empêché la mobilisation massive des citoyens contre une menace visible. Selon Rob Nixon nous manquons encore d’un narratif puissant et d’une fascination hollywoodienne pour s’attaquer à cette lente dégradation.
Pas d’objet, pas de fascination
Comment donner contour à une nébuleuse, à une dégradation amorphe et multiforme. Comment représenter une menace lente et massive. Combien de personnes réalisent que 60 à 80% des animaux marins ont déjà ingéré du plastique ou que le plutonium met plus de 24.000 ans à se dégrader.
D’autres prétendent que cognitivement l’homme a du mal à ne serait ce que concevoir la propre fin de son espèce et pire…D’en être la cause…Dans nombre de Cli-Fi (Climate Fictions), le narratif pêche par manque de « méchant extérieurs »…
Par ailleurs et Selon Rob Nixon, cette slow violence par sa “non immédiateté” et ses conséquences très éloignées des mandats politiques ou actionnariaux a été délibérément exclue du planning stratégique politique ou professionnel et, dans les décennies précédentes, a paralysé l’action transformant le citoyens lambda en “grenouille qui bout” apathique.
Paradoxalement et heureusement, dans le cas du changement climatique, la mobilisation des ONG, des jeunes générations a précédé et c’est tant mieux l’éclosion d’une fascination narrative et populaire distillée par Hollywood.
Ce n’est pas une raison pour cesser d’y réfléchir….A moins que les narratifs ne soient tout simplement plus nécessaires, comme l’explique brutalement David Wallace Wells dans son livre The Unhabitable Earth :
« Vous pouvez raconter des histoires de changement climatique quand il ne représente qu’une donnée marginale de la vie humaine. Ou une fonction envahissante de vies marginales à la nôtre. Mais à trois degrés de réchauffement ou même à quatre, personne ne se sentira isolé de son impact ou ne voudra le voir sur grand écran alors qu’il se déroule sous ses fenêtres… »