Lucile Brachet et Florent Ducos ont lancé en novembre 2018 50 Partners impact l’accélérateur de startups à impact social et environnemental de 50 Partners.
Plusieurs projets tels que Biomede, Place2swap, Katan et Ecojoko, ont rejoint la structure.
Lucile et Florent ont accepté de répondre aux questions de Umanz :
Umanz- qu’est-ce qu’un accélérateur d’impact ?
Lucile Brachet : Notre vision initiale est que l’on peut concilier business et impact. Pour nous, il y a deux types d’impacts : le business with impact et le business for impact. Les frontières sont parfois floues, nous nous situons clairement dans le second camp.
50 Partners Impact est une structure qui accompagne des entrepreneurs qui développent une solution répondant directement à un Objectif de Développement Durable au sens de l’ONU (“les ODD”). Notre métier est de les aider à se structurer pour passer à l’échelle et décupler leur impact.
Dans ce cadre, nous amenons ces startups à construire de vrais modèles crédibles en les accompagnant pendant 4 à 5 ans sur toutes les étapes clés, du financement aux opérations, avec une vision à long terme, plus longue que les startups du numérique.
Umanz- Quelles sont les caractéristiques des startups d’impact par rapport aux startups classiques ?
Florent Ducos : Startup est un mot anglais apparu au moment de la naissance du web, qui désignait une jeune entreprise développant un produit numérique sans frontières qui avait la vocation de se déployer très vite.
Chez 50 Partners Impact nous sommes dédiés aux jeunes sociétés qui adressent des sujets d’impact qui ne sont pas forcément numériques et touchent parfois à des problématiques plus complexes comme la recherche scientifique ou le développement d’une activité industrielle. On pense que l’on ne pourra pas régler tous les problèmes dans le monde avec seulement des lignes de codes ou par exemple celui de l’effondrement de la biodiversité avec uniquement une Intelligence Artificielle même s’il elle peut faire partie de la solution.
Être dans l’impact c’est souvent être dans le dur face au challenge de pré-industrialiser son produit. Dans l’impact, Il y a parfois des étapes de R&D plus longues et de time to market plus lentes. L’objectif d’une startup à impact est de pérenniser son activité, ce n’est pas forcément la même que celle d’une startup du numérique qui court après sa valorisation et la recherche du profit maximum. Il y a aussi la notion du double bilan ou triple bilan qui amène l’entrepreneur d’impact à piloter conjointement des gammes de KPI financières et extra-financières.
Dans l’impact, la diversité des projets présentés fait qu’on ne pilote pas toujours des indicateurs standards du digital comme le MRR des startups fintech, legaltech, etc… On fait face à des cas de figure très différents : de la captation du CO2 au traitement des sols. Il y a enfin souvent de gros sujets réglementaires…
Umanz – Où en est l’impact en France ?
Lucile Brachet : La France a été relativement pionnière sur l’entrepreneuriat social il y a dix ans, et l’écosystème est aujourd’hui assez bien structuré. Les entreprises de l’ESS représentent 10% du PIB, des statuts spécifiques comme l’agrément ESUS ont émergé, le gouvernement a présenté le Pacte de croissance de l’ESS l’année dernière qui pose une vraie stratégie de développement de cette économie : on va dans le bon sens mais beaucoup reste à faire.
Du côté des startups à impact nous n’en sommes qu’au début même si c’est un segment qui suscite beaucoup d’intérêt du côté des jeunes entrepreneurs qui sortent d’écoles de commerce et d’ingénieurs; mais il y a encore trop peu de success stories à la Phenix ou Ynsect.
Pour faire décoller le secteur de l’impact il faut que tout le monde bouge dans le même sens : les grandes entreprises, l’écosystème du financement, le collectif des différents acteurs de l’impact. L’envie est là : la France est un des plus gros marchés du moteur de recherche Ecosia qui est allemand, la pétition sur le climat a reçu 2 millions de signatures en très peu de temps et Yuka a été téléchargé plus de 10 millions de fois. Les consommateurs et les employés changent rapidement. Ce sont des signes forts d’un changement massif des mentalités.
Il suffit désormais de bien flécher l’argent. Et de notre côté, faciliter une meilleure compréhension des modèles d’impacts, de leurs enjeux comme par exemple la dimension industrielle d’un projet qui le rend très différent d’une startup numérique, pour développer les premières licornes du bien commun.
Umanz- Quelle est votre vision du futur de l’impact ?
Florent Ducos : À terme on ne parlera plus de l’impact comme un secteur car il a vocation à pénétrer l’ensemble des acteurs économiques. Nous souhaitons pour commencer que toutes les sociétés existantes, petites ou grandes, s’adaptent pour avoir plus d’impact positif et réduire leur impact négatif. Avec les business à impact, nous sommes au début d’un mouvement très important comme les startups du web l’ont été au début des années 2000. La France a un coup à jouer pour devenir le leader mondial du business for good et faire naître des champions de l’Impact !
C’est une révolution sociétale qui ira du « comment je produis » ? À « qui j’emploie » ? Et à « quelle est ma gouvernance » ?
L’innovation de demain se fera sur l’impact. Nous voyons se dessiner un monde où l’impact est l’objectif n°1 de toute boite qui se lance. Ce sera également le secteur où se créeront les nouveaux métiers de demain qui n’existent pas encore comme celui d’agriculteur urbain.
Notre plus grand rêve aujourd’hui est qu’une grande entreprise française (CAC40) prenne ce pari sur le futur et effectue une transition à 360°. À la Maersk.