Effective altruism : les Geeks de l’autre - Umanz

Effective altruism : les Geeks de l’autre

Jusqu’ici, on avait rarement mis les Maths au service des ONG et de la charité. Le mouvement de l’effective altruism (altruisme efficace) est porté par le jeune Philosophe William Mac Caskill et Toby Ord du Future of Humanity Institute at Oxford et qui se sont posés des questions éthiquement complexes et inédites comme combien de vies je peux sauver “réellement” avec 1000 Euros, 10.000 Euros ? Et, il y-a-t-il un moyen de rendre cela 100 fois plus efficace ?

Leur découverte : « quand vous regardez les interventions humanitaires, les moyens d’aider les gens à travers le monde, certains d’entre sont dix, cent, voire des milliers de fois plus efficaces que d’autres »

Inspirés à la fois par les travaux de Peter Singer sur « Famine, Affluence and Morality » et les théories de John von Neumann et Oskar Morgenstern dans leur ouvrage, « Théorie de l’utilité espérée Ou le Paradoxe de l’impossibilité d’Arrow », Ils s’éloignent des débats idéologiques et spirituels pour porter une pensée concrète : “nous ne pouvons agir avec efficacité si l’on attend que les choses résonnent émotionnellement ou médiatiquement”. Un parti pris qui n’est pas sans interpeller par sa froideur apparente, même si William Mac Caskill est intégralement impliqué dans sa démarche : il donne personnellement tous ses revenus dépassant les 36.000 Livres à des actions caritatives choisies.

 

L’altruisme effectif en action

Voici un aperçu du raisonnement des altruistes efficaces qui débusquent les grands mythes de l’aide et de la charité :

“Dans le monde développé, nous consacrons déjà suffisamment d’argent à la santé, à l’assainissement et à l’éducation pour garantir, par exemple, que les maladies facilement évitables ou traitables soient effectivement prévenues et traitées. Dans leur grande majorité, les problèmes qui nous restent sont des problèmes dont la résolution serait relativement coûteuse. C’est pourquoi le service national de santé britannique estime qu’il est rentable de dépenser jusqu’à 20 000 livres sterling (environ 25 000 dollars) pour une seule année de vie saine supplémentaire. »
En revanche, en raison de leur pauvreté, de nombreux pays en développement sont toujours frappés par des maladies dont le contrôle coûterait des sommes relativement minuscules au monde développé. Par exemple, GiveWell estime que le coût pour éviter la mort d’un enfant grâce à une distribution de traitement financée par la fondation « Against Malaria » est d’environ 3 700 dollars (en 2019). Le NHS dépenserait cette somme pour ajouter environ deux mois de vie saine à un patient.”

Rapidement remarqués par le New York Times et le Guardian, les altruistes efficaces mettent un point d’honneur à publier les premiers résultats de leurs dons et évaluations sur le site GivingWhatWeCan, un OVNI développé au sein de l’accélérateur YCombinator, où près de 5000 personnes se sont engagées à donner 10% de leurs revenus aux ONG sélectionnées, et qui publie, par liste alphabétique, la liste des 30 ONG qui sont, selon leurs calculs, les plus efficaces.

William Mac Caskill préside également l’initiative 80.000 Hours  qui aide les professionnels a avoir un vrai impact sur le monde . En France, le mouvement des altruistes efficaces, soutenu par Matthieu Ricard, est animé par Olivier Bertrand et Laura Green. 

Effective altruism : une posture complexe

Il n’empêche, l’Effective Altruism reste une posture complexe : la charité est-elle, doit-elle être une science ? Au premier rang des critiques adressées aux altruistes efficaces il y a cette question : “tout ce qui compte doit-il être mesuré” ?

Peut-on mettre aveuglément la data, la science et les mathématiques au service du bien ou de l’éthique et quelles sont les précautions à prendre ? Par ailleurs, est-il sain de faire un arbitrage des causes ?

Au delà du débat, demeure le souci louable de transparence.

La page remarquablement honnête et critique de Give Well quant à ses propres erreurs commises pourrait en inspirer certains…