Co-fondateur d’Akuo Energy, le premier producteur indépendant Français d’énergie renouvelable il y a douze ans. Eric Scotto est un chef d’entreprise engagé connu pour ses combats écologiques. Il a été notamment impliqué dans le financement du documentaire Demain de Cyril Dion et du film End Of The Line sur la surpêche. Il participe à travers la Fondation Akuo à 16 initiatives sociales et environnementales .
Il a accepté de répondre aux questions de la Umanz Interview :
Umanz- Présentez vous sans utiliser de titre ?
Je n’ai pas de titre sur ma carte. Je m’appelle Eric Scotto et j’anime depuis 15 ans une aventure qui consiste à proposer un nouveau modèle énergétique décentralisé et durable, j’anime l’entreprise et c’est elle qui m’anime.
Ce modèle évolue vers un modèle distribué et durable où l’énergie alimente un cloud énergétique avec de nouveaux objets connectés qui consomment et produisent de l’énergie, par exemple une maison avec ses tuiles solaires. Ces maisons sont connectées au réseau avec un compteur intelligent.
Ce projet a un fil rouge qui est d’apporter une contribution à la lutte contre le changement climatique. Je suis convaincu qu’une autre façon de produire de l’énergie est possible…De l’énergie renouvelable et durable dans dans sa composante économique. En 15 ans on a réussi à prouver que le moyen le plus compétitif était d’utiliser les énergies vertes
Umanz- Que vouliez vous faire quand vous étiez petit ?
Je voulais être professeur d’histoire et c’est les seules études que j’ai faites. J’avais même la certitude d’être prof d’histoire jusqu’à l’obtention de ma bourse à l’université de Cornell qui m’a donné confiance en moi et l’idée de faire autre chose via l’entrepreneuriat.
Umanz- Qu’est-ce que vos parents vous ont appris ?
A me lever tôt. Le sens de la valeur travail. L’envie d’étudier. Mon père était chauffeur de bus RATP. C’est une génération qui pensait qu’il était encore possible de gravir l’ascenseur social via les études.
Umanz- Quel est votre meilleur moment professionnel ?
Il y en a beaucoup. Une énorme fierté a été l’ouverture de la plus grande ferme éolienne de l’époque entre la Haute Loire et les plateaux Ardèchois, d’une capacité installée de 57 MW alors qu’à l’époque la totalité de la production française était de 112 MW.
Cela a été un combat long et compliqué : j’étais entrepreneur du online avec Maid qui a racheté Dialog puis PR Line, et fut vendu à Thomson. A travers l’énergie je suis entré dans un monde fermé et compliqué. Personne ne croyait à ma capacité car je n’étais pas ingénieur. Aucune banque n’a misé sur moi jusqu’à ce que GE croit en moi et que le Fonds Canadien Boralex, une émanation de Cascades, m’avance mes premiers capitaux.
La réalité est que ce job, cette mission et le succès des équipes donnent tellement de satisfaction aux quotidien.
Je sais désormais que si tu es convaincu du bien fondé de ton idée et que tu as la foi chevillée au corps, quel que soit ton projet, ton rêve ou ton utopie, tu trouves des solutions.
Umanz- A quoi avez vous renoncé ?
J’ai le sentiment de ne pas avoir passé assez de temps avec ma famille, un projet comme celui là prend beaucoup de temps.
Umanz- Que feriez vous si vous deviez changer de métier ?
Exactement la même chose mais dans l’agriculture. Je me consacrerai à 100% à l’émergence d’un nouveau modèle agricole respectueux de l’environnement et de la santé.
Umanz- Quelle leçon de vie aimeriez vous transmettre à vos enfants ?
Qu’il faut croire à son étoile et avoir de l’audace. La leçon de vie c’est de ne jamais prendre pour évidence que quelque chose est impossible. En chemin il faudra savoir ne jamais aller jusqu’à l’obstination donc être capable de changer de direction. Garder à l’esprit qu’on peut se tromper, se nourrir de l’échec et changer de direction. Bifurquer mais ne jamais renoncer.
Les autres leçons de vie que je veux transmettre sont la nécessité d’une reconnexion essentielle avec la terre, et l’humanisme.
Umanz- Une lecture qui vous a bouleversé ?
Eco-Economy Lester Brown.
Umanz- Qu’est ce que vous ne savez pas ?
Tellement de choses…J’ai l’impression de ne rien savoir…J’ai du mal à dire non et je ne sais absolument pas bricoler….
Umanz- Qu’avez vous appris cette année ?
J’ai appris à vivre avec un nouvel actionnaire industriel puissant, expérimenté et leader dans son domaine. J’apprends à chaque jour à m’en inspirer pour mieux consolider et développer mon business.
J’apprends aussi chaque jour à exercer un métier industriel en m’entourant de professionnels.
Umanz- Qu’est-ce qui vous inquiète ?
Qu’on ait compris la nécessité de la transition sociétale, agricole et énergétique mais que pour des intérêts économiques et politiques on s’y mette trop tard. Qu’il y ait trop d’inerties.
La peur de ne pas y arriver t’impacte toi, tes enfants et les générations futures.
Umanz- Qu’est-ce qui vous rend optimiste ?
Le comportement de mes équipes. La jeune génération qui arrive et qui est née avec le digital, une planète interconnectée, un partage des idées. Une génération pas tout à fait câblée comme nous. Qui est dans l’usage et pas la propriété. Je vois plein de changements sociétaux positifs et des comportements en faveur de la nature et de la biodiversité qui me rassurent.
Umanz- Quelle est votre phrase préférée ?
La phrase de Mark Twain : “Ils ne savaient pas que c’était impossible alors ils l’ont fait”
Umanz- Comment voyez vous le futur des énergies renouvelables ?
Autour d’un mix énergétique…Plurielles, multiples et complémentaires en fonction des ressources naturelles géographiques et topographiques.
Dans ce nouveau monde les maîtres mots seront cyclicité et disponibilité.
Le futur des énergies renouvelables sera soutenu par la montée en puissance du digital qui permettra à tout moment de concilier consommation et production dans un nuage énergétique qui combinera de nouveaux outils de stockage, de nouvelles batteries et des énergies renouvelables comme de l’hydrogène vert et restituable.
Les énergies du futur seront produites de façon distribuées, via des points de production décentralisés au sein des territoires. Elles constitueront à ce titre une garantie de maintien pérenne de l’emploi dans ces mêmes territoires, et entraîneront la responsabilisation des citoyens qui seront en capacité de les produire.
Je suis persuadé qu’elles s’imposeront comme le système dominant dans les 10 prochaines années et pour les siècles à venir.
Elles seront aussi fixatrices de populations migrantes à la recherche d’opportunités à l’étranger qui comprendront qu’il est désormais possible de construire son propre monde versus un autre monde “ailleurs”. Elles seront un socle fiable pour le développement d’infrastructures pour répondre aux besoins fondamentaux de santé et de culture.
Je suis convaincu par l’avenir de ces énergies compétitives et issues de ressources inépuisables et gratuites. Ce sont elles qui permettent d’envisager l’avenir d’une façon plus sereine pour l’ensemble des populations.